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Noël

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Message par Hélène Lun 22 Déc - 11:13

Puisque çà approche, envie de mettre quelques textes de Noël si différents...

Veille aux îles
( Lunaisons vénitiennes Paolo Barbaro )


Scintillements pour Noël, qui resplendit au milieu des boutiques pour milliardaires, de Saint-Marc au Rialto, et tout alentour. Toujours davantage d'étalages et de lumières jusque dans les quartiers populaires, où est la crise ? Ponte della Piova, Strada-nova, Barbaria, Beccarie...

Mais au-dessus des enfilades de comptoirs, entre les bords là-haut des calli, passent des flashes bleus dans ces soirs d'attente, se greffent des lumières jamais vues. Ce sont les multiples petits marchés à trois sous qui alternent leurs lampes éblouissantes pour un spectacle prêt depuis toujours, resté d'habitude dans l'ombre : il suffit d'une bâche remuée par le vent , d'un support oublié, et brusquement les nouvelles lumières enflamment les recoins les plus étranges entre les vieilles gouttières, font ouvrir des yeux éberlués dans les griffonnages des mosaïques, décochent des pierres filantes sur des anges en marche (...)

Obscurité sur la lagune qui s'étend jusqu'à la mer, rares sillages lumineux qui courent sur les eaux plus hâtifs que d'habitude : l'eau serait-elle hostile à la Nativité ? Dans ces grands miroirs impassibles, il y a tous les antagonismes de la terre , avec l'interprétation d'un Noël terrestre, correspondant précisemment au solstice d'hiver et aux campagnes gonflées sous la neige- rien de moins vénitien. (...)

Ainsi mon oncle Nino, durant cette période que je me rappelle toujours comme trés froide , sortait sur la rive , appelait son ami Amedeo, m'enfilait une "veste de chasse" et nous allions pêcher. (...)
Ils allaient surtout sans direction précise, heureux de dominer les courants en esquivant la marée , de suivre l'horizon tout en attrapant de temps en temps, quelque maigre poisson à rapporter à la maison. C'était là leur rapport avec l'idée de nature, cette nature : leur Noël liquide, incertain, hallucinant. Le Noël du continent n'y entrait pour rien; et la campagne, le grain, la neige, le soleil, la récolte, pour moins encore. La bora "s'apaisait" et insistait, les courants augmentaient ou pas, selon la lune du ciel ou les "sesse" de l'Adriatique -toujours pilotées par le dernier quartier là-haut, ou peut-être par le prochain. Et il en était de même pour nos poissons improbables, les mouettes hagardes, certains vols de cormorans arrivés ici justement aujourd'hui, de Dieu sait quelles "barene" du nord. La Nativité ici n'est pas solaire : elle est lunaire; avec tout ce qui distingue la lune du soleil et des solstices, y compris la folie de suivre sur une brève mer livide un canot sans lumière, dans des jours comme ceux-ci.

La contre-épreuve, je l'avais dés que je rentrais à la maison : trés sûr de lui, tout le contraire de NINO, mon père s'enfermait au grenier, pilonnait, tapait. Il descendait à la cuisine : avec du papier d'emballage, il construisait des montagnes, avec le papier bleu, le ciel, éclaboussait le tout de blanc pour faire la neige. On attendait l'Enfant, entre le boeuf et l'âne. Mais mon père était de la campagne, c'était un immigré dans les îles...
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Message par Hélène Lun 22 Déc - 13:41

Plusieurs textes de Colette évoquent Noël...En voici un...


MES NOELS D'ENFANT
( Colette. "Paris, de ma fenêtre" )

"Il vous paraîtra étrange que mes Noëls d'enfant -là -bas on dit "Nouël"- aient été privés du sapin frais coupé, de ses fruits de sucre, de ses petites flammes. Mais ne m'en plaignez pas trop, notre nuit du vingt-quatre était quand même une nuit de célébration, à notre silencieuse manière.
Il était bien rare que Sido n'eût pas trouvé dans le jardin, vivaces, épanouies sous la neige, les fleurs de l'ellébore que nous appelons roses de Noël.
En bouquet au centre la table, leurs boutons clos, ovales, violentés par la chaleur du beau feu, s'ouvraient avec une saccade mécanique qui étonnait les chats et que je guettais comme eux.
Nous n'avions ni boudin noir, ni boudin blanc, ni dinde aux marrons, mais les marrons seulement, bouillis et rôtis, et le chef- d'oeuvre de Sido, un pudding blanc, clouté de trois espèces de raisins, Smyrne, Malaga, Corinthe-truffé de melon confit, de cédrat en lamelles, d'oranges en petits dés.
Puis, comme il nous était loisible de veiller, la fête se prolongeait en veillée calme, au chuchotement des journaux froissés, des pages tournées, du feu sur lequel nous jetions quelque élagage vert et une poignée de gros sel qui crépitait et flambait vert sur la braise.
Quoi, rien de plus ? Non, rien. Aucun de nous ne souhaitait davantage, ne se plaignait d'avoir trop peu. Le sifflant hiver assiégeait les persiennes. La grosse bouilloire de cuivre, assise dans les cendres, et les cruchons de terre qu'elle allait remplir, nous promettaient des lits chauds dans les chambres froides.
-Maman, je ne veux pas me coucher! Je veux veiller toute la nuit, toutes les nuits!
-A ton gré, Minet-Chéri... Voilà le jour. Tu vois, la neige devient bleue entre les lames des persiennes. Tu n'entends pas que les poules chantent ?
Je croyais veiller encore. C'est que, surprise par l'heure tardive, je dormais déjà, la tête sur mes bras pliés, mes tresses au long des joues comme deux couleuvres gardiennes. "
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Message par Hélène Lun 22 Déc - 14:41

Tous les peintres n'ont pas vécu dans la misère , loin de là...Certains comme Monet cultivaient même un véritable art de vivre...


On déjeune à midi pour une fois. La salle à manger est en fête avec ses guirlandes de feuillages et de fleurs simples, ses cristaux et son argenterie sur une de ces nappes des grands jours qui embellit encore le service jaune; au centre de la table , des coupes où flottent cette fois des ombelles de viburnum blanc, roses de Noël , jasmin...Les enfants trouvent à leur place les fameux "petits papiers" : ces enveloppes presque carrées gris clair doublées de rose garance, contenant une somme d'argent de la part de Bonne (pour Bonne-Maman) et Monet, et à côté des serviettes, de mystérieuses petites boîtes de douceurs et de colifichets: broches, épingles, médaillons, montres de gousset, tandis que les cadeaux importants attendent sous l'arbre installé dans le salon mauve.
Lors de ces déjeuners de Noël , on redécouvre cette survivance de temps anciens où un sévère esprit de caste régnait sur la basse-cour, mettant l'oie au plus bas de l'échelle sociale, où l'on fait le plus grand cas du poulet , et où seuls les chapons et les poulardes sont dignes de figurer sur une bonne table.
Au menu, pour commencer, des oeufs brouillés aux truffes ou de la lotte à l'américaine, et, selon la tradition, le foie gras truffé en croute arrivé de Strasbourg précédant les chapons truffés et farcis sur un lit de marrons et de truffes venues du Périgord, servis avec une purée de marrons. Une allègre salade de petites mâches rompt la solennité de ces plats, un gorgonzola ou Roquefort suit. Enfin, vient cet instant qui, pour les enfants contient la vraie magie de Noël : Paul ferme les volets et apporte le Christmas Pudding autour duquel on a versé généreusement du rhum , il craque une allumette , arrose le pudding et le flambe à la grande joie de tous qui poussent des cris d'admiration ; le cristal des carafes de vin et de champagne , souvent du Veuve Cliquot, brille soudain du plus grand éclat. Puis pour terminer ce festin, la glace à la banane faite à la maison dans la brave vieille sorbetière si méritante apparaît semblable à un pain de sucre...


(Les carnets de cuisine de Monet Claire Joyces/Jean-Bernard Naudin )
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Message par Hélène Mar 23 Déc - 9:02

"Dans un coin de la salle à manger, un petit pin, devenu sapin pour la circonstance: à ses branches étaient suspendus une douzaine de pièges tout neufs, un couteau de chasse, un poudrier, un train à ressort, du fil d'archal pour faire des collets, des sucres d'orge, un pistolet à bouchon, enfin toutes sortes de richesses. Lili ouvrait de grands yeux, et ne disait pas un mot: on l'aurait pris sous un chapeau.
Ce fut une soirée mémorable: Je n'en avais jamais vécu d'aussi longue. Je me gavai de dattes, de fruits confits, et de crème fouettée; je fus si bien secondé par Lili que vers minuit je constatai qu'il respirait par saccades et qu'il gardait la bouche ouverte pendant des minutes entières. Par trois fois, ma mère nous proposa le sommeil. Par trois fois nous refusâmes, car il restait encore des raisins secs, que nous croquâmes sans plaisir véritable, mais à cause du luxe qu'ils représentaient."

( Le Chateau de ma mère Marcel Pagnol )
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Message par Hélène Mar 23 Déc - 9:22

Les lumières brillantes des magasins, où les branches et les baies de houx pétillaient à la chaleur des becs de gaz placés derrière les fenêtres, jetaient sur les visages pâles des passants un reflet rougeâtre. Les boutiques de marchands de volailles et
d'épiciers étaient devenues comme un décor splendide, un glorieux spectacle, qui ne permettait pas de croire que la vulgaire pensée de négoce et de trafic eût rien à démêler avec ce luxe inusité. Le lord-maire, dans sa puissante forteresse de Mansion-House, donnait ses ordres à ses cinquante cuisiniers et à ses cinquante sommeliers pour fêter Noël, comme doit le faire la maison d'un lord-maire; et même le petit tailleur qu'il avait condamné, le lundi précédent, à une amende de cinq schellings pour s'être
laissé arrêter dans les rues ivre et faisant un tapage infernal, préparait tout dans son galetas pour le pouding du lendemain,tandis que sa maigre moitié sortait, avec son maigre nourrisson dans les bras, pour aller acheter à la boucherie le morceau de boeuf indispensable.

( Le cantique de Noël Charles Dickens )
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Message par Hélène Mar 23 Déc - 17:18

Dehors, Ie vent de la nuit soufflait en éparpillant la musique des cloches, et, à mesure, des lumières apparaissaient dans l'ombre aux flancs du mont Ventoux, en haut duquel s'élevaient les vieilles tours de Trinquelage. C'étaient des familles de métayers qui venaient entendre la messe de minuit au château. Ils grimpaient la côte en chantant par groupes de cinq ou six, Ie père en avant, la lanterne en main, les femmes enveloppées dans leurs grandes mantes brunes où les enfants se serraient et s'abritaient. Malgré l'heure et Ie froid, tout ce brave peuple marchait allégrement, soutenu par l'idée qu'au sortir de la messe, il y aurait, comme tous les ans, table mise pour eux en bas dans les cuisines. De temps en temps, sur la rude montée, Ie carrosse d'un seigneur précédé de porteurs de torches, faisait miroiter ses glaces au clair de lune, ou bien une mule trottait en agitant ses sonnailles, et à la lueur des falots enveloppés de brume, les métayers reconnaissaient leur bailli et Ie saluaient au passage :
- Bonsoir bonsoir maître Arnoton !
- Bonsoir, bonsoir, mes enfants !
La nuit était claire, les étoiles avivées de froid ; la bise piquait, et un fin grésil, glissant sur les vêtements sans les mouiller, gardait fidèlement la tradition des Noëls blancs de neige. Tout en haut de la côte, Ie château apparaissait comme Ie but, avec sa masse énorme de tours, de pignons, Ie clocher de sa chapelle montant dans Ie ciel bleu noir, et une foule de petites lumières qui clignotaient, allaient, venaient, s'agitaient à toutes les fenêtres, et ressemblaient, sur Ie fond sombre du bâtiment, aux étincelles courant dans des cendres de papier brûlé... Passé Ie pont-levis et la poterne, il fallait, pour se rendre à la chapelle, traverser la première cour, pleine de carrosses, de valets, de chaises à porteurs, toute claire du feu des torches et de la flambée des cuisines. On entendait Ie tintement des tournebroches, Ie fracas des casseroles, Ie choc des cristaux et de l'argenterie remués dans les apprêts d'un repas ; par là-dessus, une vapeur tiède, qui sentait bon les chairs rôties et les herbes fortes des sauces compliquées, faisait dire aux métayers, comme au chapelain, comme au bailli, comme à tout Ie monde :
- Quel bon réveillon nous allons faire après la messe !
Drelindin din !... Drelindin din !...
C'est la messe de minuit qui commence. Dans la chapelle du château, une cathédrale en miniature, aux arceaux entrecroisés, aux boiseries de chêne, montant jusqu'à hauteur des murs, les tapisseries ont été tendues, tous les cierges allumés. Et que de monde ! Et que de toilettes! Voici d'abord, assis dans les stalles sculptées qui entourent Ie chœur Ie sire de Trinquelage, en habit de taffetas saumon, et près de lui tous les nobles seigneurs invités. En face, sur des prie-Dieu garnis de velours, ont pris place la vieille marquise douairière dans sa robe de brocart couleur de feu et la jeune dame de Trinquelage, coiffée d'une haute tour de dentelle gaufrée à la dernière mode de la cour de France. Plus bas on voit, vêtus de noir avec de vastes perruques en pointe et des visages rasés, Ie bailli Thomas Arnoton et Ie tabellion maître Ambroy, deux notes graves parmi les soies voyantes et les damas brochés. Puis viennent les gras majordomes, les pages, les piqueurs, les intendants, dame Barbe, toutes ses clefs pendues sur Ie côté à un clavier d'argent fin. Au fond, sur les bancs, c'est Ie bas office, les servantes, les métayers avec leurs familles ; et enfin, là-bas, tout contre la porte qu'ils entrouvrent et referment discrètement, messieurs les marmitons qui viennent entre deux sauces prendre un petit air de messe et apporter une odeur de réveillon dans l'église toute en fête et tiède de tant de cierges allumés.

( Les Trois Messes Basses Alphonse Daudet )
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Message par Hélène Mar 23 Déc - 17:40

Tel était le malheureux enfant qui, le 25 décembre 1886, se rendit à Notre-Dame de Paris pour y suivre les offices de Noël. Je commençais alors à écrire et il me semblait que dans les cérémonies catholiques, considérées avec un dilettantisme supérieur, je trouverai un exitant approprié et la matière de quelques exercices décadents. C'est dans ces dispositions que, coudoyé et bousculé par la foule, j'assistai, avec un plaisir médiocre, à la grand-messe. Puis, n'ayant rien de mieux à faire, je revins aux vêpres. Les enfants de la maîtrise en robes blanches et les élèves du petit séminaire de saint Nicolas du Chardonnet qui les assisataient, étaient en train de chanter ce que je sus plus tard être la Magnificat. J'étais moi-même debout dans la foule, près du second pilier à l'entrée du choeur à droite du côté de la sacristie. Et c'est alors que se produisit l'événement qui domine toute ma vie. En un instant mon coeur fut touché et je crus. je crus, d'une telle force d'adhésion, d'un tel soulèvement de tout mon être, d'une conviction si puissante, d'une telle certitude ne laissant place à aucune espèce de doute, que, depuis, tous les livres, tous les raisonnements, tous les hasards d'une vie agitée, n'ont pu ébranler ma foi, ni, à vrai dire, la toucher.

( Paul Claudel Contacts et circonstances )
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